Vers une imagerie noninvasive du métabolisme de la tomate

Vers une imagerie noninvasive du métabolisme de la tomate

Mieux comprendre l’évolution chimique des fruits mais également la répartition spatiale des métabolites au sein du fruit, et ceci au cours de leur développement ou de leur stockage, est un enjeu primordial pour fournir au consommateur un produit de qualité.

Résumé : Mieux comprendre l’évolution chimique des fruits mais également la répartition spatiale des métabolites au sein du fruit, et ceci au cours de leur développement ou de leur stockage, est un enjeu primordial pour fournir au consommateur un produit de qualité. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est l’outil analytique de référence pour imager de manière non invasive et non destructrice des objets. L’IRM par contraste d’échange chimique est proposée comme une nouvelle approche pour imager sélectivement les principaux métabolites de la tomate : les sucres d’une part et le glutamate, GABA et glutamine d’autre part.

Contexte et enjeux :

Les propriétés structurales ou chimiques, déterminants des qualités organoleptiques comme le goût sucré ou la jutosité, des différents tissus d’un fruit charnu varient au cours de son développement. La caractérisation de la répartition des métabolites dans le fruit intact permettrait de mettre en relation ces propriétés métaboliques avec la qualité du produit. Des caractérisations non invasives de la répartition des métabolites lors des différents stades de maturité du fruit ou lors de son stockage permettraient de mieux comprendre l’importance de chaque molécule. De par son utilisation à la fois comme modèle de fruits charnus et son importance économique, la tomate a été choisie pour cette étude.

Pour imager un objet de manière non invasive et non destructive, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est la méthode analytique de choix. Classiquement, l’IRM image les molécules d’eau et leurs propriétés locales. Cependant, il existe deux approches permettant d’obtenir une image donnant la concentration en métabolites. La première est basée sur l’enregistrement d’un spectre pour chaque point de l’image (imagerie spectroscopique). La seconde est sensible aux fonctions chimiques possédant un atome d’hydrogène s’échangeant avec l’eau (imagerie par contraste de transfert de saturation par échange chimique, CEST). Il est alors possible d’imager différentes fonctions comme les hydroxyles ou les amines en choisissant astucieusement les conditions expérimentales.

Résultats :

cest tomato illustration

Des tomates à un stade de maturité rouge mûr sont imagées à la fois en imagerie spectroscopique et en imagerie CEST dans une IRM à haut champs magnétique (11,7T). Les spectres obtenus en imagerie spectroscopique sont soit non reproductibles à l’intérieur d’un même tissu, soit d’une résolution spectrale trop faible. L’imagerie spectroscopique n’est donc pas une méthode appropriée pour imager la tomate car elle s’avère trop sensible aux hétérogénéités du champ magnétique induites par la microstructure complexe du fruit, notamment aux interfaces des différents tissus. En imagerie CEST en revanche, ces hétérogénéités sont mesurées, puis corrigées. Les images obtenues sont donc insensibles à ce facteur. L’effet CEST a été mesuré dans deux zones de fréquences différentes. L’une à ~ 1 ppm du signal de l’eau correspondant aux hydrogènes des fonctions hydroxyles et l’autre à ~ 3 ppm pour les fonctions amines. En utilisant la connaissance a priori des concentrations des métabolites dans la tomate, ces signaux ont pu être attribués respectivement principalement aux carbohydrates et aux acides aminés ; glutamine, glutamate et GABA. Les images CEST montrent une répartition différente pour chacune de ces familles de métabolites : les sucres étant principalement dans le tissus loculaire enveloppant les graines et le glutamate, GABA et la glutamine dans la columelle, l’axe central du fruit.

Perspectives :

Pour suivre l’évolution temporelle de la répartition des métabolites, l’IRM CEST sera réalisée en fonction du stade de maturité de la tomate. Cette approche générique de cartographie spatio-temporelle pourrait être étendue à d’autres métabolites et à la plupart des fruits et légumes produits en agriculture.

Contact : guilhem.pages@inrae.fr 

Partenaires :  Département BAP : INRAE, Univ. Bordeaux, Biologie du Fruit et Pathologie, UMR 1332, F-33140 Villenave d’Ornon, France

Voir aussi

Guilhem Pagès, Catherine Deborde, Martine Lemaire-Chamley, Annick Moing, J.-M. Bonny. MRSI vs CEST MRI to understand tomato metabolism in ripening fruit: is there a better contrast?. Analytical and Bioanalytical Chemistry, 2021, 413, pp.1251-1257. ⟨10.1007/s00216-020-03101-w⟩⟨hal-03101885⟩

Van Zijl, P.C.M. and Yadav, N.N. Chemical exchange saturation transfer (CEST): What is in a name and what isn't? Magn. Reson. Med. 2011;927-948.

Lemaire-Chamley M, Mounet F, Deborde C, Maucourt M, Jacob D, Moing A. NMR-based tissular and developmental metabolomics of tomato fruit. Metabolites. 2019;9:93.